
"Nous avons vécu une crise, il y a eu une prise de conscience. Nous souhaitons en profiter pour faire bouger les lignes." C'est sur ce ton volontaire que Sébastien Windsor, président de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCA), présente à Localtis le plan de relance des chambres d'agriculture. Ce plan, détaillé devant la presse lors d'une conférence organisée le 3 juin 2020, comporte un volet à court terme pour pallier l'urgence des secteurs les plus en difficulté (voir encadré ci-dessous) mais surtout un plan de relance à plus long terme misant sur la souveraineté alimentaire et la relocalisation de la production. Et ce après le débat manqué des états généraux de l'alimentation (les propositions en ce sens ayant été enterrées aussitôt).
"Plusieurs études ont ainsi montré que le taux d'autonomie alimentaire des 100 plus grandes aires urbaines n'atteignait que 2,1% en moyenne", indique le document de l'APCA, proposant de promouvoir une territorialisation des approvisionnements en accélérant le déploiement des projets agricoles et alimentaires territoriaux (PAT), assortis de partenariats entre producteurs, transformateurs et collectivités territoriales et en mettant en œuvre de nouvelles règles de la commande publique. "L'Europe interdit toujours de mettre ne serait-ce qu'un critère concernant la distance d'approvisionnement ou son origine, il faut faire bouger ça avec les parlementaires, aujourd'hui c'est peut-être faisable", souligne Sébastien Windsor, qui indique que les chambres d'agriculture vont se lancer dans des rencontres auprès des collectivités dans les deux ans qui viennent pour parler de ces projets.
La promotion des circuits courts
Autre levier : étendre l'objectif de 50% d'approvisionnements de produits de qualité ou locaux dans la restauration collective publique au secteur privé. "Il faut que la commande publique soit exemplaire, mais il faut travailler sur la restauration privée hors domicile, travailler sur l'étiquetage des produits et leur origine", indique le responsable de l'APCA.
La promotion des circuits courts peut aussi favoriser la souveraineté alimentaire. "On peut capitaliser sur les changements d'attitude développés durant la crise, avec un engouement pour la vente en circuits courts", assure Sébastien Windsor. Parmi les leviers pour les développer : inciter les collectivités à mettre à disposition des producteurs des locaux inutilisés ou leur proposer des loyers modérés pour la vente et la distribution de leurs produits, déployer la 4G et les équipements nécessaires, diffuser en libre accès au grand public un annuaire et une cartographie des producteurs fermiers, des drives, des magasins en ventes directes de produits fermiers, fixer un pourcentage minimum de produits fermiers aux grandes enseignes. La question du foncier agricole est également explorée, l'APCA regrettant le rejet en décembre 2019 de la proposition de résolution sur la résilience alimentaire des territoires et la sécurité nationale de la sénatrice Françoise Laborde, qui sanctuarisait les terres agricoles. Les propositions de l'APCA dans ce domaine : inscrire le foncier agricole comme "secteur d'activité d'importance vitale" (SAIV) et inscrire dans la loi que la surface agricole utile (SAU) ne descende pas en-dessous de 50% du territoire métropolitain, et mettre en place des pôles agro-industriels pour une relance de la production d'agroéquipements de haute technologie en France.
Revoir la place du secteur agricole dans les CPER
Le plan de relance de l'APCA s'appuie aussi sur un "vaste plan de modernisation des structures agricoles", qui pourrait être élargi à l'accompagnement des jeunes installés pour s'adapter à la nouvelle donne (innovations, nouvelles technologies, exigences climatiques…), et sur le développement de l'emploi dans le secteur agricole. "Le secteur agricole apparaît de manière plus prégnante aujourd'hui comme un véritable gisement d'emplois et pourrait en cela constituer une réponse à la hausse du chômage", indique le document, avec une population relativement jeune et moins qualifiée que la moyenne des salariés.
Quant aux leviers financiers, "nous avons besoin que les politiques publiques, territoriales, françaises, européennes s'alignent, et que chacune porte sa part du changement, martèle Sébastien Windsor, nous avons un premier élément de satisfaction sur la PAC (politique agricole commune) puisque les 15 milliards d'euros supplémentaires annoncés le 27 mai par Bruxelles sont fléchés sur le deuxième pilier, qui permet d'accompagner les agriculteurs et les exploitations agricoles" (voir notre article). Ce pilier avait été fortement amputé dans le cadre de la précédente proposition de la Commission européenne. L'APCA espère aussi revoir la place du secteur agricole dans les contrats de plan Etat-régions (CPER). "On ne sait pas si on y arrivera, concède Sébastien Windsor, mais c'est l'ambition qui est portée."
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